La politique monétaire du Japon risque de poser problème aux pays émergents voisins
La politique monétaire du Japon en matière d’assouplissement quantitatif a eu un impact spectaculaire sur les marchés actions. Depuis l’entrée en fonction de Haruhiko Kuroda à la tête de la Banque Centrale le 20 mars dernier, le Nikkei a gagné près de 23%. Longtemps attendue, cette politique expansive pose néanmoins quelques questions, notamment pour son effet sur les pays émergents alentours.
Certes, les détenteurs d’actions nippones avaient de quoi se réjouir cette année, les compagnies nationales bénéficiant largement des injections de liquidité, d’une croissance enfin positive (+0,9% au T1 2013) et d’un certain coup d’arrêt à la déflation. Mais la dépréciation agressive du yen (le taux de change USDJPY est par exemple passé de 77 en octobre 2012 à 100 en mai 2013) posera également problème à terme. Cela risque en effet de créer un avantage compétitif démesuré pour les compagnies nippones à l’international, en particulier pour celles qui sont présentes dans les économies émergentes telles que la Corée du Sud, l’Indonésie ou la Thaïlande. Dans ces pays, les importations en provenance du Japon peuvent représenter jusqu’à 20% du produit intérieur brut. Les compagnies japonaises qui y sont présentes risquent de déstabiliser les entreprises nationales et d’éroder leur rentabilité, affectant en retour le développement de leur pays auquel elles contribuent tant.
Si le fait de présenter une diversification internationale et une exposition forte aux pays émergents s’avérait être un facteur de réjouissance pour les entreprises des pays développés, cela pourrait bien être perçu comme une tare à l’avenir, en particulier pour les entreprises axées autour des biens de consommation quotidiens, les plus exposées à un ralentissement de la demande locale.
D’aucuns pensent que la chute du yen devrait se poursuivre pour de nombreux mois, à la fois sous l’effet des Abenomics certes, mais également à cause de la vigueur retrouvée du dollar. Depuis le début des régimes flottants en 1973, jamais le dollar n’avait connu plus de 8 mois d’appréciation face au yen. L’impact de la FED sur cette appréciation du dollar n’est pas à négliger. La Réserve Fédéral est en effet la seule Banque Centrale à envisager actuellement la possibilité de freiner ou couper ses programmes d’assouplissement quantitatif et maîtriser l’expansion de sa masse monétaire, renforçant l’attrait du billet vert pour les investisseurs. Cela ne veut pas dire que ce freinage monétaire interviendra dès les prochains mois, mais les investisseurs estiment que la FED pourrait bien être la première Banque Centrale à agir de la sorte.
Car, de l’autre côté de l’Atlantique, les Banques Centrales semblent encore occupées à rassurer les investisseurs. N’oublions pas que la Banque d’Angleterre vient de choisir le canadien Mark Carney pour prendre la relève de Sir Mervyn King dès le 1er juin 2013 et poursuivre la politique d’achat d’actifs. Mark Carney, lui-même gouverneur de la Banque du Canada, est connu pour avoir inondé le marché canadien de liquidité afin de tirer le pays en dehors de la crise des subprimes. Quant à la Banque Centrale Européenne, celle-ci a abaissé son taux directeur à 0,5% le 2 mai dernier, tout en réaffirmant sa disposition à poursuivre sa politique monétaire accommodante.