Aligner les intérêts des actionnaires avec ceux des dirigeants : deux leviers
Pour tout investisseur qui se respecte, la question de l’alignement des intérêts des actionnaires avec ceux des dirigeants en place dans l’entreprise est cruciale. Une gestion financière idéale consiste en effet à maximiser la valeur de l’action. Mais comment s’assurer que cet alignement a bien lieu ? Quel sont les moyens à disposition des actionnaires pour contrôler les dirigeants dans leur gestion quotidienne ? Deux leviers sont à distinguer : celui de la rémunération et celui du conseil d’administration.
Contrôler les dirigeants par le biais des rémunérations
Le premier levier à disposition des actionnaires pour contrôler les dirigeants et leur performance a trait aux rémunérations. En effet, ces dernières, fixes ou variables, peuvent être votées au cours des conseils d’administration pour les dirigeants les plus gradés d’une entreprise. Elles sont généralement liées à l’atteinte d’objectifs internes (nombre de ventes, chiffre d’affaires, etc.) ou externes (prix de l’action, image de l’entreprise, etc.). La nouvelle version du code de bonnes pratiques du MEDEF, ébauchée en 2013, prévoyait justement de donner la possibilité aux assemblées générales de se prononcer sur les rémunérations individuelles des mandataires sociaux. Un exemple concret de rémunération votée par les actionnaires fut celui de Maurice Levy, président du directoire du groupe Publicis. Son salaire de 4,8 Mln€ pour l’année 2012 fut approuvé lors d’une assemblée générale.
D’une façon moins frontale, plus motivante, les dirigeants se voient souvent offrir des actions ou des stock-options, les encourageant plus directement à maximiser la valeur du titre de l’entreprise en Bourse. Début 2013, François-Henri Pinault, PDG de PPR a par exemple annoncé avoir exercé 50.000 stock-options reçues en mai 2005, réalisant ainsi un profit de 3,9 Mln€. Bien plus que son salaire, qui n’atteignait « que » 3 Mln€ en 2011.
La seconde façon de motiver les dirigeants, toujours par le biais des rémunérations, est d’encourager la progression au sein de l’entreprise. Plus un manager est performant, plus il grimpera rapidement les échelons de l’entreprise, et plus sa rémunération de base augmentera. Il pourra également se « revendre » plus facilement à la concurrence. Les actionnaires d’autres entreprises pourraient en effet le considérer comme un élément moteur pouvant accroître la valeur de l’action.
Contrôler les dirigeants par le biais du conseil d’administration
Les hauts dirigeants d’une entreprise sont en général choisis par le conseil d’administration, dont les membres sont eux-mêmes choisis par les actionnaires. Par conséquent, si les actionnaires sont insatisfaits vis-à-vis de la performance d’un dirigeant, ils peuvent décider directement de son éviction. L’un des cas les plus connus est certainement celui de Steve Jobs, fondateur dirigeant d’Apple, qui fut évincé de sa propre entreprise en 1985, par son CEO John Sculley… alors que S. Jobs cherchait lui-même à évincer J. Sculley !
A plus grande échelle, l’un des mécanismes les plus craints par les dirigeants en mauvaise passe est la course aux procurations. Un groupe d’actionnaires insatisfaits peut en effet chercher à obtenir des procurations afin de voter au nom d’autres actionnaires, en les sollicitant directement. Les actionnaires dissidents peuvent ainsi influencer ou changer les membres du conseil d’administration et, in fine, remplacer les dirigeants en place. Cette forme d’activisme actionnarial n’est pas rare. En 2012, le fonds d’investissement Pershing Square Capital Management, L.P. a par exemple fait voter sa propre liste de candidats au conseil de Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée.
Une autre façon de contrôler les dirigeants est tout simplement de le faire via une acquisition. Une entreprise mal gérée est, en théorie, une entreprise dont le cours de l’action est inférieur à ce qu’il devrait être si l’entreprise était bien gérée. Le cours de l’action est donc sous valorisé. Par conséquent, l’entreprise deviendrait une cible pour des acquéreurs prêts à prendre des risques et qui ne verraient pas d’un mauvais œil le remplacement de la classe dirigeante.